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Le mythe de la mobilité

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Déménager pour garder son poste ou retrouver un emploi : face à un chômage qui frappe tous les territoires, la mobilité des salariés est-elle vraiment la panacée ?

En examinant les trente zones d'emploi les plus pénalisées depuis le début des années 2000, l'économiste Laurent Davezies a mis en évidence, dans son récent ouvrage "La crise qui vient" (Seuil), une mobilité de proximité. «On a longtemps cru à un phénomène vertueux selon lequel les actifs quittent les territoires où leur avenir n'est pas garanti (nord et est) pour saisir des opportunités de progression sociale ailleurs (ouest et sud notamment). Or, pas du tout ! Ils partent juste à côté, pour aller d'un territoire qui va très mal à un territoire voisin qui va… mal», explique-t-il. «Reims a ainsi reçu plus d'actifs venus des zones en difficulté que Rennes, Nantes et Toulouse réunis», note le professeur du CNAM pour lequel la «mobilité est un facteur de progrès, de croissance».

Selon lui, cette mobilité française, «extrêmement ralentie» notamment par rapport aux Etats-Unis, reste cependant «une liberté pour les cadres et une violence pour les ouvriers». Premier frein cité par Laurent Davezies, le logement : des droits de mutation très élevés pour les propriétaires (contrairement aux Etat-Unis) et, pour les locataires, une flambée des loyers qui rend impossible le relogement, notamment dans les métropoles. Dans son viseur figurent également les HLM, au départ destinés à loger les travailleurs, qui les «fixent» désormais durablement dans des zones sinistrées.

Des «logiques d'ancrage» parfaitement «rationnelles»

Pour expliquer cette faible mobilité, son confrère de Sciences-Po Etienne Wasmer insiste, lui, sur «l'intensité des contacts amicaux et familiaux» en France et dans le sud de l'Europe, à l'opposé du Nord où l'on fréquente davantage les clubs et retisse plus facilement du lien social. Ce facteur crée, selon lui, «un goulet d'étranglement sociétal» qui explique en partie la persistance de forts taux de chômage dans le sud.

De son côté, Cécile Vignal, maître de conférence en sociologie à Lille I, préconise de ne pas «psychologiser» des «logiques d'ancrage» qu'elle qualifie de «rationnelles». En 2000, l'universitaire a étudié le cas d'une usine de métallurgie de Laon (Aisne) délocalisée à Sens (Yonne) : sur les 300 salariés, seuls 27% avaient accepté la mutation, 73% préférant un licenciement. Alors que les mutations sont de plus en plus fréquentes dans les grands groupes en restructuration, Cécile Vignal montre que les modes de vie populaires puisent, dans la proximité, des ressources «non monétisables» dont la perte a de lourdes conséquences : entraide pour la garde d'enfants, aide aux parents âgés, débrouille pour s'alimenter et se vêtir... Revenue sur son terrain dix ans après, elle en a tiré «une grande leçon» : plus de la moitié de ceux qui ont cru se protéger en acceptant la mutation ont finalement été licenciés ou ont fini par démissionner. «La mobilité forcée est vouée à l'échec», conclut-elle.

«Si l'encouragement devient une injonction, le risque est de fragiliser les individus des classes populaires», estime également Sylvie Fol, professeur à Paris I, qui dénonce «le mythe et l'idéologie de la mobilité comme facteur d'intégration sociale». En 2009, un rapport parlementaire, commandé par François Fillon et resté lettre morte, dénonçait la «relative inertie de la mobilité géographique» «rigidifiant notre marché du travail» et appelait à multiplier les aides financières et les dispositifs d'accompagnement. Une injonction mise à mal par une enquête du Monde démontrant que la forte hausse du chômage en 2012 a davantage touché des zones d'emploi jusqu'ici protégées.

(Source : 20 Minutes)

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