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Crise : la tentation des réformes antisociales

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Comme l'a théorisé Naomi Klein dans «La stratégie du choc», les crises sont toujours le bon moment pour faire passer des réformes antisociales. L'Angleterre l'a fait. En France, ça démange sacrément.

La crise offre des opportunités à ne pas louper. Le gouvernement conservateur anglais a mis en place le plan rêvé des pourfendeurs de l’"assistanat". Après les Etats-Unis dans les années 70, l'Angleterre se met au workfare : les personnes aptes doivent travailler gratuitement en échange du versement de leurs aides sociales. En toile de fond, la figure du mauvais pauvre, profiteur, se dessine. En Angleterre, le plan concerne les chômeurs en fin de droits (soit au bout d'un an) et les jeunes sans qualification cumulant plus de six mois de chômage. Autant dire un paquet de monde.

La Grande-Bretagne bat des records de chômage : 2,64 millions en novembre. Du jamais vu depuis dix-sept ans. Le nombre de jeunes sans emploi dépasse pour la première fois le cap symbolique du million. Les prévisions de croissance sont mauvaises. Le gouvernement a promis un plan d'austérité : 700.000 emplois publics vont être supprimés.

Aux Etats-Unis, le workfare concerne surtout des emplois dédiés à la communauté (régler la circulation, entretenir les espaces verts). Les jobcenters anglais envoient les jeunes travailler gratos pour des supermarchés comme Tesco, Poundland ou Sainsbury's. Le plan ne garantit aucun retour à l'emploi, tout juste un entretien. Des "bénévoles" forcés peuvent se retrouver en compétition pour le même job virtuel. Théoriquement, les intéressés ont un délai d'une semaine pour se rétracter.

"Nous avons été utilisés pour faire du travail gratuit"

Dans son numéro du 16 novembre, The Guardian rapporte le témoignage de Cait Reilly. Cette jeune Anglaise de 22 ans vient d'achever trois semaines à Poundland ("Tout à 1 livre"). Cette licenciée en géologie a rangé et nettoyé les rayons comme n'importe quel autre employé. "Nous avons été utilisés pour faire du travail gratuit", estime-t-elle. Lorsqu'on lui a proposé la place, elle a signalé avoir déjà eu ce genre d'expérience. Son jobcenter lui a répondu que si elle refusait, elle perdrait ses 59 euros d'allocation hebdomadaire (70 pour les plus de 25 ans). Elle a cédé. "Sans, je n'ai rien pour vivre", justifie Reilly.

The Guardian rapporte aussi le témoignage de James Rayburn, 21 ans. Il a travaillé deux mois gratuitement pour la compagnie Tesco — 4,1 milliards d'euros de bénéfices avant impôts. "Personne se savait vraiment ce qu'on était censés faire", raconte-t-il. Ni Reilly ni Rayburn ne se sont vu signifier leur droit de rétractation.

Rompre avec la culture du non-travail

Les conservateurs britanniques le jurent : ce plan ne vise "pas à punir ou à humilier" mais à rompre avec "l'habitude du non-travail". Les émeutes, qui ont impliqué cet été de nombreux jeunes des quartiers déshérités, sont encore dans toutes les têtes. Les travaillistes estiment que ce plan est incohérent car le nombre d'emplois disponibles est inférieur à celui des chômeurs. Selon The Guardian, des avocats mènent une action en justice pour assimiler ce travail imposé à de l'esclavagisme.

Qu'en est-il de ce côté de la Manche ? Laurent Wauquiez avait bien fait une tentative au printemps en proposant de conditionner le versement du RSA à cinq heures de travail gratuit hebdomadaire. Devant les réactions indignées, jusque dans son camp, le chef de file de la "Droite sociale" avait reculé. Le 15 novembre, à Bordeaux, Nicolas Sarkozy a relancé la chasse "aux profiteurs du bas". Il a annoncé la mise en place en début d'année d'une expérimentation visant à conditionner le versement du RSA à sept heures de travail par semaine. Payées, cette fois. "C'est plus subtil, note ironiquement Martin Hirsch, créateur du RSA, mais c'est de l'affichage, car le vrai problème est qu'il n'y a pas de travail."

Pour l'économiste Denis Clerc, cette nouvelle loi peut "apporter le pire comme le meilleur". Le meilleur, si les heures sont payées et si les bénéficiaires acquièrent un savoir-faire. Le pire, ce serait comme en Angleterre. "J'ai peur que les départements et communes qui accueillent l'expérimentation — toutes dirigées par la droite — ne fassent aucun effort pour accompagner et considèrent le plan comme une punition... Le contexte actuel fait craindre le pire", conclut-il. Qu'en cas de refus, on ampute le RSA. Que cela multiplie les emplois misérables.

En 2007, l'UMP avait inclus le workfare dans son programme. Martin Hirsch s'y était opposé. Une idée pour 2012 ?

(Source : Les Inrocks)

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Mis à jour ( Lundi, 02 Janvier 2012 11:49 )  

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