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Accueil Social, économie et politique Européennes : les abstentionnistes ont donné leurs voix au libéralisme triomphant

Européennes : les abstentionnistes ont donné leurs voix au libéralisme triomphant

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L'abstention et la droite conservatrice sont les grands vainqueurs du scrutin des élections de ce triste 7 juin 2009. Avec plus de 59% d'abstention en France et presque autant ailleurs, le bilan est sévère pour l'institution européenne, accusée de technocratie et sanctionnée par une indifférence générale. Sévère pour notre système démocratique auquel de moins en moins de citoyens semblent adhérer. Encore plus sévère pour la gauche et notamment la vraie, aussi divisée et illisible que la fausse (c'est-à-dire le PS).

C'est un comble ! Alors que la crise du système libéral fait que des centaines de milliers d'Européens, jour après jour, voient leurs conditions de vie se dégrader et que l'Europe sociale demeure une arlésienne, rien qu'une chimère de plus, ils ont gentiment laissé les pelles entre les mains de leurs fossoyeurs...

Passivité ? Indifférence ? Lassitude ? «Qui n'a rien ne craint rien», paraît-il. Disons-le tout de suite : c'est une catastrophe pour les Smicards, les jeunes, les précaires, les chômeurs… tous ces «gens de peu» n'ayant que leur force de travail à vendre sur un marché qui les dévore quand il ne les ignore pas. Aussi une catastrophe pour les «classes moyennes», vouées à disparaître encore plus vite bien qu'elles se pensent immunisées ! En gros, telle est la majorité des électeurs qui se sont abstenus. Soit parce qu'ils «s'en foutent» (les jeunes ? On les comprend… sans compter que M6 et TF1 ont bien fait leur boulot), soit parce qu'ils sont «dégoûtés» (tous ces ouvriers et employés qui se sentent trahis ou non représentés), soit parce qu'ils avaient «mieux à faire» (des «classes moyennes» qui, ne mesurant pas ce qui les attend et en vertu du carpe diem sont, entre autre, parties en week-end)...

Qu'on croit ou non au pouvoir des urnes, l'abstention, même massive, n'a jamais rien pesé ni empêché. Quant à ceux qui avaient «mieux à faire», ils devraient savoir que les absents ont toujours tort.

Car les mieux lotis, eux, n'ont pas manqué cette occasion d'aller défendre leur rumsteack sauce libérale. Le vote, eux, ils y croient ! Contrairement à nous, ils se sentent bien représentés et bien défendus. Quant à ceux qui ont pensé qu'aller voter ne changera rien à leur sort, ils vont désormais bouffer et rebouffer une soupe libérale de plus en plus claire, de plus en plus «populaire», jusqu'à en vomir. Peut-être faut-il en arriver là ? Loin devant l'anarcho-autonomie, la connerie masochiste est, hélas, le premier extrémisme humain. C'est seulement quand on touche le fond qu'on tente de rectifier le tir : l'Histoire nous en a donné moult leçons, jamais retenues.

La peau de l'autruche contre celle de Cassandre

Comme disait ma prof de latin quand j'étais en sixième, le progrès est un bien grand mot : on peut progresser en avant… comme en arrière; autant faut-il en avoir conscience. Ainsi, gravées dans le marbre du Conseil européen, les «réformes» en défaveur des peuples vont s'accélérer et, surtout en France, comme nous l'avons régulièrement signalé ici, ce n'est pas une blague : notre Smic est vraiment menacé. Privatisations à gogo, flexibilité accrue et baisse continue des salaires : dans cette Europe en marche, confortée par le (non-)scrutin d'hier, la dérégulation, l'individualisme et l'intérêt privé triompheront de l'intérêt général tandis que l'alignement se fera exclusivement par le bas, point. Nul progrès en cela, sauf pour les parasites de l'économie mondiale qui, sur le dos d'une armée de pue-la-sueur payés au lance-pierre, continueront à s'en foutre plein les poches; tous ces vrais «assistés» qu'on a vaguement pointé du doigt pour des raisons aussi médiatiques qu'éphémères...

Difficile de jouer les Cassandre. Et difficile à croire pour ceux et celles qui ont la tête dans le guidon, qui en chient au quotidien et dont la capacité à s'informer est inversement proportionnelle à leur aliénation; majorité silencieuse qui ose encore faire confiance à un héritage humaniste ou «éthique», aujourd'hui totalement illusoire — voire archaïque, si ce n'est «hystérique et obsessionnel», selon les propos du secrétaire général de l'UMP. Ils ne s'imaginent pas dans quel tournant néfaste, véritable retour au XIXe siècle, nous nous engouffrons. Après moi le déluge ! Mais, peut-être, faut-il que nous allions jusque là pour redécouvrir, un beau jour, la nécessité du partage des richesses et de la solidarité, puis entendre enfin ce que des intellectuels et experts, qu'on ne voit jamais à la télévision ni sous les jupes de l'Elysée, ont comme bonnes idées à nous soumettre : car ceux qui ont le pouvoir ne savent rien (leur incompétence le prouve) et ceux qui savent, hélas, n'ont aucun pouvoir.

60% d'abstention, c'est autant de voix pour ceux qui nous ont foutu dans la merde

Aujourd'hui, plus de la moitié des lois françaises sont des applications de directives discutées et votées par le Parlement européen. Dans la simili-démocratie que nous connaissons et dont nous pouvons hélas nous glorifier à l'aune des nombreux régimes totalitaires qui sévissent sur la planète (et dont certains sont des poids lourds de l'économie mondiale), ces élections sont donc aussi «importantes» que nos élections législatives : celles des députés français qui votent «nos» lois, elles aussi relativement boudées. Mais le Français moyen continue à se déplacer essentiellement pour les présidentielles, c'est vachement plus «glamour».

28% pour l'UMP, en voilà un score à relativiser quant aux 40% de participation ! Où est le «succès important» invoqué en grande pompe par Xavier Bertrand ? Quelle est sa légitimité ? La réponse réside dans la désinformation croissante, notamment en matière de politique et d'économie, pratiquée en France depuis plusieurs années et davantage depuis l'élection de Nicolas Sarkozy. Les Français, jeunes ou vieux, subissent… et ignorent, au gré des écrans de fumée successifs qu'on leur présente, avec la complicité des médias. Or, la politique est l'affaire de tous. L'ignorer, c'est laisser les autres s'emparer de nos vies. Seule une conscience politique, léguée par la famille ou un entourage influent, permet de susciter l'effort de se pencher sur ce bourbier. Effort ô combien remarquable tant la chose, pourtant assez simple, est rendue complexe; tant les pressions de notre société hyper-concurrentielle, doublée des manœuvres écœurantes de ceux qui détiennent le pouvoir, nous poussent… à l'évasion.

A gauche, les cartes sont brouillées

Réveillés par la crise, deux antagonismes sont clairement naissants : les «pro-libéralisme» et les anti-libéraux, pour rester pondéré. Le PS (17%) et Europe Ecologie (15%), l'un considéré comme vaincu et l'autre comme vainqueur, sont — ne nous leurrons pas — des libéraux bon teint. S'ils invoquent tous deux une Europe sociale, ils ont soutenu le traité de Lisbonne qui acte le contraire. En fait, cette gauche sociale-démocrate (dite «modérée» ou «caviar»…) et mâtinée d'écologie à l'heure du réchauffement climatique, par un astucieux déplacement des voix, réalise finalement un excellent score : environ 33%, soit plus que l'UMP-NC.

Mais les authentiques laissés-pour-compte dont la plupart, visiblement, ne fait toujours pas la différence entre fausse et vraie gauche, sont massivement restés chez eux. Ou, s'ils sont allés voter, se sont, pour certains, visiblement réfugiés à nouveau chez Le Pen.

Alors que le libéralisme — allez, disons-le : le capitalisme ! — nous a foutu dans la merde, la gauche anticapitaliste a échoué. Seul le Front de Gauche (6,3%) tire son épingle du jeu avec 4 sièges tandis que le NPA (5%) revient bredouille et que, pour LO, c'est carrément goodbye... La révolution, c'est pas pour demain : l'heure est, pour l'instant, à la «composition» dans un paysage plus que décomposé. Cette vraie gauche, indispensable pour permettre aux victimes du système de sortir enfin de leur léthargie, a bien du mal à se construire. A eux trois (environ 12% des suffrages), s'ils s'étaient unis, ils seraient arrivés derrière Europe Ecologie et devant le Modem (8,5%). Quel gâchis !

Imaginons comment nos 60% d'abstentionnistes — ces «électeurs orphelins» dégoûtés, indifférents ou ayant d'autres chats à fouetter… —, s'ils n'avaient pas attendu après une campagne volontairement foireuse, s'étaient un tantinet d'eux-mêmes intéressés à cette élection puis rendus dans les bureaux de vote, auraient pu modifier la donne. Alea jacta est, disait-on à Rome (où Berlusconi cartonne !). Alea jacta est, disait ma prof de latin. Pour les esprits éclairés dont nous prétendons, ici à Actuchomage, faire partie, munissons-nous d'un immense courage pour les années à venir, et efforçons-nous d'insuffler aux dégoûtés ou aux ignares de la politique que nous croiserons sur notre chemin la curiosité et la lumière qui leur font cruellement défaut.

SH
Mis à jour ( Lundi, 27 Juillet 2009 01:13 )  

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