Une salariée de Pôle Emploi menacée de licenciement pour avoir refusé l'EID

Jeudi, 22 Septembre 2011 11:27
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Tel est le sort des désobéissants. Isabelle, qui boycotte l'Entretien d'Inscription et de Diagnostic, est convoquée le 13 octobre à sa Direction générale devant une commission disciplinaire.

Isabelle de Léon est conseillère à l'emploi dans une agence de Toulouse. Comme de trop rares collègues qui respectent jusqu'au bout leurs convictions humanistes, elle est entrée en résistance contre l'EID, cet "entretien deux-en-un" que la direction de Pôle Emploi impose à ses agents depuis quelques mois afin de rentabiliser leur tâche.

Pour tout savoir sur l'EID, cliquez ici.

Dès le mois d'avril, Isabelle a courageusement bravé sa direction en boycottant sa formation, et justifié cet acte de désobéissance en adressant une lettre à son directeur régional et au DG de Pôle Emploi, Christian Charpy. Le 29 avril, elle a été convoquée à un entretien disciplinaire à la Direction régionale Midi-Pyrénées, qui s'est soldé par un blâme. Depuis, elle continue d'aller travailler à son agence.

Jeudi dernier, elle a donné de ses nouvelles — qui ne sont pas bonnes — au site La Fusion pour les Nuls, qui relaie son affaire depuis le début :

Toulouse, le 15 septembre 2011

Bonjour à toutes et à tous,

Il m’a semblé important de vous tenir informés de ma situation, que vos messages aient été de soutien ou plus critiques lors de cette première bataille publique que j’ai souhaité engager contre l’EID.

Suite à mon courrier public remis le 18 Avril 2011 dans lequel j’exposais mes arguments pour refuser d’appliquer l’EID, j’ai été convoquée par Monsieur Dubrunfaut (DR de Midi-Pyrénées) le 29 avril 2011 pour une action disciplinaire qui s’est soldée par un blâme que la Direction Régionale m’a notifié le 23 Mai 2011.

J’ai déposé une requête en annulation au Tribunal Administratif qui a été enregistrée le 19 juillet 2011.

Depuis, accompagnée et soutenue par l’intersyndicale SUD, CGT, SNU, FO Midi Pyrénées, je n’ai pas cessé le combat, même s’il a pu paraître silencieux sur les ondes médiatiques ou informatiques. Mais une nouvelle confrontation s’annonce, puisque je suis convoquée le 13 Octobre à la DG devant une commission disciplinaire visant à m’infliger une sanction qui pourrait aller jusqu’au licenciement.

Il me paraissait donc important de vous communiquer cette information toute récente, et de vous dire que si ce combat est resté peu visible jusqu’à ce jour, il n’en a pas moins gardé sa force et sa conviction.

En effet, tous les jours sur le terrain, je constate, certainement comme vous malheureusement, que mes inquiétudes ne sont pas infondées. Un faisceau d’observations et de constats confirme une dégradation alarmante des conditions de travail, et donc de réception et de suivi des demandeurs d’emploi.

Plus que jamais, je reste convaincue que nous devons défendre le Service Public, qu’il reste le seul véritable outil de redistribution, le seul garant possible d’égalité de traitement et le seul capable de maintenir les droits et besoins fondamentaux d’aujourd’hui et de demain.

Nous sommes responsables de son devenir, car nous en sommes les acteurs quotidiens sur le terrain. Seuls à assumer au jour le jour les conséquences des décisions néfastes de nos dirigeants, qu’ils soient élus ou administrateurs. Seuls à recevoir la détresse et le désarroi des personnes que nous mettons en difficultés par un système de plus en plus complexe dans lequel ils se perdent et où, parfois, nous nous égarons aussi.

Pour beaucoup d’entre nous, les quelques certitudes que nous avions dans un contexte de travail en changement continuel sont ébranlées : nouvelles procédures, nouvelles interfaces, nouvelles réglementations… Chercher une information devient un challenge et, souvent, les réponses sont à confirmer…

Nous devons exiger que le Service Public de l’Emploi, dans cette période de crise et d’incertitude pour tous, soit un lieu d’accueil de qualité, qui puisse fonctionner dans de bonnes conditions et non pas sur des objectifs chiffrés impossibles à tenir, où tout le monde est perdant. C’est dans cet esprit que je pense que l’EID n’est pas à-propos. L’inscription doit être gérée, sur le versant indemnisation, par des personnels formés et expérimentés qui sont en capacité de chercher au maximum le bénéfice de l’ouverture de droits, et de suivre le traitement des dossiers indemnisation sur site. De même, l’élaboration du premier entretien et des premières actions (je ne m’aventurerais jamais à parler de diagnostic !) exige une pluralité de champs de connaissances, d’outils, de procédures tellement étendue et en constants changements que, là encore, s’impose non seulement la nécessité d’être formé et expérimenté, mais d’être en auto-formation permanente. Il ne peut s’agir d’appliquer au minimum des procédures pré-pensées et préétablies qui ne s’adaptent pas à la situation individuelle de chaque demandeur d’emploi.

Nous pouvons, ensemble, regagner nos véritables missions, si nous agissons et si nous ne perdons pas de vue que le service aux demandeurs d’emploi représente l’essentiel de notre mission.

J’ai engagé une démarche de conviction, d’autres moyens de contestation sont envisageables, des moyens abordables par tous, et ce «TOUS» change «TOUT» dans l’appréhension que nous avons des sanctions possibles qui souvent nous freinent dans l’action.

Je compte sur votre soutien dans ces moments qui s’annoncent encore peu agréables...

Isabelle de Léon



L'intersyndicale SUD, CGT, SNU, FO Midi Pyrénées a lancé une pétition de soutien «à Isabelle et autres résistant-e-s à l'EID». Si le cœur vous en dit, SIGNEZ-LA (nous, Actuchomage, l'avons fait).

Par ailleurs, contre l'EID, les syndicats CFDT, CGT, FO, SNAP, SNU et SUD du Pôle Emploi Bretagne appellent à la grève reconductible le lundi 10 octobre => Lire ici.

SH

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Mis à jour ( Mercredi, 09 Novembre 2011 14:51 )