Mise en condition des esprits pour un nouveau dépeçage de l'assurance chômage

Mardi, 22 Janvier 2013 19:51
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C'était à prévoir : alors que la convention Unedic doit être renégociée fin 2013 et que l'organisme affichera un déficit cumulé de 18 milliards, il faut bien préparer l'opinion aux restrictions à venir.

Après les attaques habituelles contre notre système d'indemnisation, «cadeau empoisonné» incitant à la paresse, sans oublier «ces chômeurs» à qui Le Figaro reproche de travailler «en toute légalité» — comme si c'était de leur faute si 90% des offres d'emplois proposées actuellement sont précaires et qu'il est effectivement possible d'alterner ou cumuler allocation et activité réduite —, le bourrage de crâne politico-médiatique commence !

Ainsi, dix mois à l'avance, se prépare la mise en condition des esprits devant une alarmante évidence : 18,6 milliards de déficit cumulé prévus fin 2013, qu'il faudra bien résorber par une réduction drastique des allocations chômage doublée d'un durcissement des conditions d'accès aux droits, sous couvert d'amélioration de l'accompagnement des chômeurs (pansement sur une jambe de bois tant que les destructions d'emplois resteront aussi massives. Car, plus que l'accompagnement, l'urgence aujourd'hui pour éviter la misère, c'est bien l'indemnisation)...

Il s'agit donc, progressivement, d'ouvrir un boulevard aux organisations syndicales patronales et aux organisations syndicales salariales collaboratrices (CFDT, CFTC, CFE-CGC) chargées de nous faire avaler la pilule en décembre prochain, avec le même succès que lors de la récente négociation sur l'emploi et pour la grande satisfaction du Medef.

La première offensive est venue de la finance via l'agence de notation Standard & Poor's, qui a dégradé jeudi la note de l'Unedic sans justification.

L'offensive suivante émane de la très sérieuse Cour des comptes, présidée par le "socialiste" Didier Migaud, dont on peut voir un peu partout des copiés-collés de résumé AFP. Pour les plus courageux, le rapport de 170 pages est consultable ici. Sinon, on peut lire l'article "original" de L'Expansion qui sonne la fin de la récré — eh oui : la généreuse convention actuellement en vigueur a été négociée avant la crise… — ou bien celui des Echos qui met l'accent sur une situation «insoutenable» — pourtant, il y a peu, La Tribune estimait que l'Unedic tiendrait le coup grâce, notamment, à l'explosion des chômeurs en fin de droits non indemnisés par le régime...

Toujours le même blah-blah : les intermittents du spectacle ont bon dos, les cadres supérieurs aussi — mais Dieu merci, la CFE-CGC veille sur eux —, sans oublier «ces chômeurs qui travaillent» et qu'on préfèrera spolier plutôt que de s'en prendre radicalement aux employeurs qui abusent de la précarité (rappelons que la taxation des contrats courts adoptée le 11 janvier dernier par les "partenaires sociaux" sera inopérante, puisqu'elle ne concernera que 30% d'entre eux)... Plus généralement, la France est trop protectrice, trop généreuse par rapport à ses voisins — une litanie fallacieuse qui, de surcroît, fait fi du rôle d'amortisseur que joue l'indemnisation du chômage sur la pauvreté, un paramètre qu'on passe volontiers à la trappe alors qu'il est primordial pour notre économie.

En revanche, la Cour des comptes a raison de dénoncer l'inefficacité des contrats aidés (effet d'aubaine) et nombre de dispositifs tout aussi onéreux qu'inopérants. Elle a raison de dénoncer l'inégalité de traitement entre chômeurs (accès à la formation ou au CSP) et la mauvaise répartion des aides (ce sont ceux qui en ont le moins besoin qui en bénéficient le plus aisément).

A part ça, on peut s'attendre au pire. Le matraquage est en route et ce n'est qu'un début. Avec l'accord sur l'emploi approuvé par le gouvernement, les salariés y ont eu droit il y a onze jours. D'ici décembre, ce sera le tour des chômeurs et tout sera fin prêt pour un nouveau dépeçage de leurs droits.

SH

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Mis à jour ( Dimanche, 27 Janvier 2013 16:30 )