Absentéisme scolaire : le non-dit des journaux télévisés

Vendredi, 23 Janvier 2009 07:06
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La majorité des Français se contente, hélas, de la grande messe du 20 heures pour suivre, bon an mal an, les actualités. Or, on le sait, les journaux télévisés n'informent qu'à moitié, quand ils ne désinforment pas complètement.

Hier soir, j'ai zappé entre LCI, BFM-TV (Marschall-Truchot et leurs téléspectateurs qui peuvent intervenir en direct par webcam), France 2 ou TF1 afin d'observer la manière dont l'initiative de Xavier Darcos serait traitée. Quelles ne furent pas ma stupéfaction et ma colère de constater qu'aucun d'entre eux n'a lâché le terme CONTRATS AIDÉS et, surtout, expliqué de quoi il en retourne alors que leur utilisation est au cœur du dispositif.

Tous ont dit que le ministre voulait recruter «5.000 agents» ou «médiateurs» pour remettre les élèves qui décrochent sur le droit chemin : a priori, une excellente nouvelle. Et chacun de sortir des chiffres et des pourcentages sur l'absentéisme scolaire. Ici un expert pour expliquer le phénomène, son apparition et ses causes. Ailleurs, un syndicaliste (pas trop virulent, ou coupé au montage) pour critiquer les suppressions de postes dans l'Education nationale et faire valoir qu'il y a déjà des personnels qualifiés pour cela. Sinon, une institutrice de dire que c'est peut-être une bonne idée, mais de s'interroger sur le niveau de formation de ces nouvelles recrues...

RIEN sur la précarisation galopante des emplois publics (10 à 25% de contrats précaires selon les secteurs). RIEN sur le vrai visage des contrats aidés, partie intégrante de la panoplie gouvernementale censée lutter contre le chômage, et qui ne font jamais l'objet d'un examen plus approfondi.

Pourtant, si les Français savaient ce que sont réellement ces emplois, ils ne verraient pas l'initiative de M. Darcos d'un bon œil. UN CONTRAT AIDÉ, C'EST :

• un CDD à temps partiel rémunéré au Smic (autrement dit, un emploi jetable payé une misère) qui, de plus en plus souvent, se permet d'exiger de l'expérience et des qualifications => voir exemples en commentaire…

• un travail si mal payé que son «bénéficiaire» peut certes le cumuler avec certaines aides, mais où les mauvaises surprises sont fréquentes (perte de droits, imbroglios administratifs ou juridiques…)

• une véritable aubaine car quasi gratuit pour l'employeur : celui-ci ayant la bonté d'offrir un petit boulot à un RMIste, il est en contrepartie grassement subventionné par l'Etat (tant est si bien que le plus de la moitié du budget «emploi» de Bercy est consacré aux exonérations et allègements de «charges» sur les bas salaires au détriment de ses autres missions : accompagnement, orientation et formation des chômeurs)

• un emploi qui, au lieu de servir de tremplin à la réinsertion professionnelle de l'intéressé, le stigmatise et l'abonne à ce type de contrats (selon un rapport de la Cour des comptes => lire en commentaire…)

Grâce à leur coût très faible, au déclassement systématique des candidats sélectionnés et à la précarité/flexibilité qu'ils induisent, les contrats aidés dévalorisent le travail. Exerçant un dumping social, ils se substituent à de vrais postes (notamment aux emplois pérennes supprimés dans la Fonction publique) et concurrencent même les emplois classiques au Smic.

Pour finir, non seulement ils coûtent une fortune à l'Etat et aux collectivités locales, mais ils contribuent au déficit de recettes de toute la protection sociale !

Voilà ce que sont les «contrats aidés».

Et voilà sous quelles conditions M. Darcos entend lutter contre l'absentéisme scolaire : confier à des travailleurs pauvres et précaires «une fonction d'insertion» vis-à-vis de familles elles-mêmes en difficulté. Une aberration limite immorale.

Il faut en finir avec les contrats aidés. Il faut en finir avec le démantèlement de l'Education nationale. Et il faut en finir avec les JT.

S.H.

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Mis à jour ( Vendredi, 23 Janvier 2009 07:06 )