EADS : Villepin joue au sauveur

Mercredi, 24 Mai 2006 12:28
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Histoire de tourner la page Clearstream en démontrant qu'il se préoccupe avant tout du problème n°1 des Français, c'est-à-dire l'emploi, Dominique de Villepin a fait hier une visite surprise aux ouvriers de la Sogerma menacés de pointer au chômage, et solennellement appelé EADS à sauvegarder l'activité industrielle du site de Mérignac dont la fermeture est repoussée à fin juin.

Sogerma Services est la filiale de maintenance aéronautique d'EADS à Mérignac (Gironde), groupe franco-allemand dont l'Etat français est actionnaire à hauteur de 15%. L'année dernière, 190 emplois y ont déjà été supprimés, et le nouveau plan de restructuration actuellement à l'étude menace plus de 1.100 personnes.

Ravi de redorer son blason sérieusement terni aux yeux de l'opinion publique, le Premier ministre a trouvé une belle occasion de faire preuve de "patriotisme économique". Dès sa descente d'avion, sur le tarmac, face aux hangars de l'usine de maintenance, élégant et bronzé, le chef du gouvernement a voulu affirmer sa détermination : «Qu'il y ait dans notre pays, comme partout, des mutations industrielles, c'est normal. Mais que d'un trait de plume on décide de supprimer 1.100 emplois, c'est inacceptable. (...) J'ai un objectif : obtenir qu'une activité industrielle se poursuive par le groupe EADS ici, à Mérignac, et que le plus grand nombre d'emplois soient préservés. L'industrie aéronautique est installée à Mérignac depuis des générations, il est donc important que cette activité continue.» Et de rajouter : «Je retiens que, oui, il y a un avenir pour ce site industriel. Il y a un savoir-faire, une technologie, une compétence, qui méritent d'être défendus.»

Pourtant, la veille à Paris, les représentants de l'intersyndicale s'étaient heurtés à une fin de non-recevoir de la part de la direction du groupe. Cet après-midi, Dominique de Villepin recevra à Matignon le coprésident d'EADS Noël Forgeard, ainsi qu'Arnaud Lagardère, actionnaire à 7,5%.

Bernard Tachoires (FO) accueille avec réserve la succession des événements : «On sent bien que le gouvernement se lance dans un bras de fer avec EADS, mais ce que l'on souhaite, c'est un projet fort et concret. Là, il n'y a rien de gagné, on attend la réaction de l'industriel.» Car suite au passage du Premier ministre, le groupe EADS a indiqué qu'il allait étudier la réindustrialisation partielle du site "visant un noyau de 300 emplois". Une mesure loin d'être suffisante.
Le représentant FO n'est pas dupe : «Des hommes politiques de haut rang, de droite, de gauche, on en a reçu quelques-uns. Quel que soit leur bord, ils ont tout intérêt à se saisir d'un problème industriel. Et puis, la politique, elle se fait sur l'ours ; pourquoi elle ne se ferait pas sur nous ? On voulait un débat national, on l'a. Pour nous tout est bon.» En dix jours, les salariés de la Sogerma ont vu se précipiter à leur chevet (entre autres) messieurs Hollande, Fabius, Emmanuelli, Mamère ou Borloo… jusqu'à la dernière démonstration de politique-spectacle offerte par Dominique Galouzeau de Villepin. Et c'est dignement qu'ils manifesteront aujourd'hui à Paris devant le siège d'EADS France, puis devant l'Assemblée Nationale.

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Mis à jour ( Mercredi, 24 Mai 2006 12:28 )