Comment l'Algérie réprime ses chômeurs

Samedi, 19 Mars 2011 12:17
Imprimer
A Hassi Messaoud, on les passe à tabac. A Mostaganem, on les espionne puis on les arrête. Là-bas, pas question de revendiquer ses droits.

On parle peu de ce pays qui, lui aussi, est secoué depuis plusieurs semaines par des mouvements sociaux touchant tous les secteurs de la société. Deux événements ont particulièrement retenu notre attention.

D'abord à Hassi Messaoud, cité pétrolière à 900 km au sud-est d'Alger, considérée comme la ville la plus riche d'Algérie. Mercredi, lors d'une manifestation réunissant quelque 500 privés d'emploi venus protester contre la corruption qui ronge les services du bureau officiel d'embauche, la gendarmerie nationale a violemment chargé les participants. "Une quinzaine de jeunes ont été grièvement blessés et au moins deux autres demeurent en état d'arrestation. Les forces anti-émeutes de la gendarmerie ont roué de coups et passé à tabac de nombreux chômeurs qui ont manifesté pacifiquement", a rapporté un porte-parole du Comité national de défense des droits des chômeurs (CNDDC). "Ils nous ont battus de tous les côtés. Les coups pleuvaient sur nos corps. Beaucoup d'entre nous se sont retrouvés avec une jambe ou un bras cassés. D'autres ont été blessés à la tête", a témoigné l'un d'entre eux.

Le même jour à Mostaganem, ville située à 365 km à l'ouest d'Alger, Dalila, une jeune femme de 35 ans, diplômée au chômage depuis huit ans et militante au CNDDC, a été arrêtée par la police, interrogée puis placée en garde-à-vue pendant 24 heures. Depuis le lundi, elle était suivie par des policiers en civil. Accusée de "servir les projets politiques de certaines organisations qui cherchent à déstabiliser l'Algérie", elle doit comparaitre le 28 avril prochain pour "incitation à un rassemblement illégal et non armé par le biais de distribution de tracts". Elle risque une année de prison ferme... Une année de prison pour avoir revendiqué son droit à un emploi !

Enfin, sachez qu'en Algérie, des chômeurs désespérés continuent à se donner la mort. Le dernier recensé avait 20 ans; il s'est pendu.

Officiellement, le taux de chômage algérien serait d'environ 10%, mais des économistes indépendants l'estiment à plus de 15%. Chez les femmes, il dépasse 18%. Chez les moins de 25 ans, il dépasse 21%. Et il touche 87% des moins de 35 ans : un véritable gâchis humain.

SH

Articles les plus récents :
Articles les plus anciens :

Mis à jour ( Samedi, 19 Mars 2011 12:58 )