Les Egyptiens pris en otage par des grévistes !

Mardi, 01 Février 2011 10:13
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Ce matin, sur BFM-TV, première chaîne de désinformation en continu, on se penchait sur l'exaspération des commerçants, artisans et guides touristiques "ruinés" par une contestation qu'ils désapprouvent.

Admirez ce reportage, petit bijou de propagande ultralibérale (désolée pour la pollution publicitaire… chez BFM-TV, c'est tous les quarts d'heure, comme le point sur la Bourse, entre deux "éditions" d'une vacuité affligeante ponctuées "d'alertes info" particulièrement ineptes).

Des témoins triés sur le volet, qui «préfèrent éviter de parler politique» et «ne demandent pas le départ de Moubarak mais au moins plus de considération», ne nous épargnent ni les méchants casseurs, ni le chantage à l'emploi : «Le pays devrait vite reprendre le travail», dit un directeur d'hôtel. Ici, on ne parle pas de justice sociale et de démocratie mais de chiffre d'affaires. Un chamelier bien joufflu se déclare «ruiné» alors que 40% de ses concitoyens vit avec moins de 2 dollars par jour. Bref, une magnifique démonstration de corporatisme et de bêtise à l'heure où l'avenir de leur grande et riche nation, pillée par une poignée d'oligarques et de multinationales, se joue sous leurs yeux.

Comment ne pas penser à nos micro-trottoirs d'usagers des transports "pris en otages" par des grévistes (ou par la neige, ou par un volcan islandais…) dont les JT nous abreuvent ? Alors que la pyramide de nos acquis sociaux s'effondre doucement et que nos salaires sont gelés, que des millions de Français n'ont même pas les moyens de partir en vacances, on nous montre le spectacle d'individus en colère coincés dans des gares ou des aéroports, dont la capacité d'indignation se limite à leur égoïsme. Qu'ils soient bloqués sur la route du ski ou en train de courir pour gagner leur Smic, la courte vue, le chacun pour soi et la soumission au système sont la norme. Les quelques courageux qui osent le contester sont des "privilégiés" à blâmer : telle est la leçon à retenir. A sa décharge, on dira que BFM-TV n'est pas l'unique zélateur de l'idéologie dominante, loin s'en faut.

Qu'elle soit larvée — via le formatage et la désinformation — ou bien réelle, ici ou ailleurs, on peut dire que la censure règne. Et la révolte, ce n'est pas bon pour les prédateurs/affairistes de tout poil : on apprend qu'elle n'est pas non plus du goût des agences de notation qui, après avoir dégradé la note de la Tunisie, viennent de faire de même avec celle de l'Egypte.

Un appel à la grève générale avec manifestations géantes a été lancé pour aujourd'hui. Plus d'un million d'Egyptiens doivent se retrouver dans la rue afin d'obtenir le départ de leur président corrompu. N'en déplaise à BFM-TV et ses chameliers de Gizeh, un scénario à la tunisienne se profile, et c'est tant mieux.

SH

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Mis à jour ( Mardi, 01 Février 2011 12:20 )