Renault coupable de discrimination raciale

Mercredi, 02 Avril 2008 21:22
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La cour d'appel de Versailles a reconnu ce jour Renault coupable de discrimination raciale envers deux ex-salariés, déboutés en première instance, qui estimaient avoir eu des carrières moins intéressantes que leurs collègues blancs à cause de leur origine.

«C'est la première fois que la justice, pourtant très hésitante dans ce domaine, reconnaît Renault coupable de discrimination raciale», s'est félicitée Me Florence Laussucq-Caston, conseil des deux ex-salariés.

Le constructeur automobile a été condamné à verser à Lucien Breleur, employé comme électricien automobile de 1971 à 2003, 80.000 € de dommages & intérêts et 8.000 € au titre du préjudice moral. Renault a également été condamné à verser à Daniel Kotor, ouvrier spécialisé puis agent administratif de 1983 à 2004, 60.000 € de dommages & intérêts et 8.000 € au titre du préjudice moral. «La société Renault doit réparer le préjudice subi par M. Kotor et M. Breleur du fait de blocage de leur carrière et du maintien de leur rémunération à un niveau inférieur de ce qu'il aurait dû être», a estimé la Cour dans son arrêt. La Cour a en revanche débouté trois autres ex-salariés et un salarié.

Renault, dont l'ancien président Louis Schweitzer dirige actuellement la Haute autorité de lutte contre les discriminations (HALDE), a réagi en expliquant que l'entreprise «avait toujours condamné le racisme sous toutes ses formes» et ne pratiquait «en aucun cas la discrimination raciale» (lire en commentaire - ndlr). «Le groupe a pour objectif de faire progresser ses collaborateurs sans autre distinction que celle fondée sur leur mérite et leur réussite», a ajouté le groupe dans un communiqué, en précisant que le constructeur automobile avait signé la Déclaration des droits sociaux fondamentaux avec les syndicats mondiaux de la métallurgie et ceux de Renault, ainsi que la charte de la diversité en France.

Soutenus par la CGT et le MRAP, les six plaignants, d'origine togolaise ou algérienne notamment, avaient été engagés entre 1966 et 1973 et réclamaient environ 1 million d'euros de dédommagement, car ils estimaient avoir été lésés dans leur carrière à cause de leur couleur de peau. Dans son arrêt, la Cour a estimé que «Renault n'apporte pas la preuve qu'il lui incombe, que la différence de traitement entre M. Breleur et M. Kotor et les autres salariés est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur l'appartenance ou la non-appartenance vraie ou supposée de ces deux salariés à une ethnie, une nation ou une race».

«Il revenait à Renault de prouver que ces deux salariés, pourtant bien évalués, motivés et bons équipiers, n'avaient pas été bloqués dans leur carrière à cause de leur origine», a expliqué Me Florence Laussucq. «En l'absence de preuve, Renault est implicitement reconnu coupable de discrimination raciale», a-t-elle ajouté. Après l'étude d'un échantillon d'évolution de carrière de dix salariés, il apparaît selon la Cour que «les autres salariés ont tous eu une évolution plus importante que celle de M. Breleur et Kotor» alors même que ces derniers étaient bien évalués. Un représentant du personnel avait par ailleurs versé au dossier une attestation qui rapportait que M. Kotor avait été traité de «singe» et de «bougre de nègre» par sa hiérarchie.

En décembre 2005, le conseil des Prud'hommes de Boulogne-Billancourt avait débouté les six salariés dont ces deux demandeurs, estimant qu’«il n'y avait pas de fait relatif à une discrimination raciale». Ce jugement en appel risque de faire jurisprudence en matière de discrimination professionnelle.

(Source : Le Parisien)

=> AUJOURD'HUI, l'UMP veut épargner les employeurs qui discriminent en réduisant à 5 ans au lieu de 30 la durée de prescription des procédures civiles contre les discriminations, dont celles au travail : LIRE ICI…

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Mis à jour ( Mercredi, 02 Avril 2008 21:22 )