Le chômage tue : Il est temps d'en parler

Vendredi, 06 Novembre 2009 14:30
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Depuis sa création, Actuchomage dénonce un mal qui se propage : Les souffrances du chômage et de la précarité. Un engagement aujourd’hui «récompensé» par une série de reportages diffusés sur France 5. Car le chômage tue et il est grand temps d'en parler !

Du «Manuel du Chômeur décomplexé» aux nombreux articles et témoignages mis en ligne depuis cinq ans, Actuchomage ne cesse de soutenir celles et ceux qui sont en grande souffrance face au chômage et à la précarité. Ainsi, en février 2005, réagissions-nous aux propos intolérables du député UMP de la Creuse, Jean Auclair, tenus à l’Assemblée nationale : «Mais ils ne veulent pas travailler, les chômeurs. Etre payés à ne rien faire, c’est cela qui les intéresse !», lançait alors cet irresponsable. Et «mourir de ne rien faire» cela intéresse-t-il aussi ces «fainéants» de chômeurs ?, lui répondions-nous avant de poursuivre : Chaque année en France, 160.000 personnes tentent de mettre fin à leurs jours. 12.000 y parviennent (évaluation de l’INSERM). Le suicide est beaucoup plus meurtrier que les accidents de la route. En 30 ans, le taux de suicide a fortement augmenté : il est passé de 1,73 à 2,13 pour 10.000 habitants. Si les femmes et les jeunes sont les plus nombreux à tenter de mettre fin à leurs jours, les décès concernent surtout les hommes (3 suicides sur 4) et notamment les 25/55 ans.

Le chômage, la précarité et leurs conséquences en sont-ils une cause ?

L’affirmative s’impose d’évidence même si les études portant sur ce facteur sont rares. Si aucune corrélation directe n’a été établie entre le nombre de suicides et la courbe de l’activité économique, quelques événements forts semblent peser. Ainsi, le pic de mortalité de 1976 serait lié à la hausse du chômage consécutive à la crise pétrolière et aux angoisses suscitées par cette période de grande incertitude; le pic de 1993 correspond aussi à une année de forte récession.

Pour notre part, à Actuchomage, nous avons pu mesurer à maintes reprises les conséquences désastreuses d’une longue période d’inactivité forcée. Nous avons eu l’occasion de croiser des copines et des copains marqués par des symptômes extrêmement préoccupants : sautes d’humeur, dépression, asthénie, prise de poids, alcoolisme, tabagie, somatisations diverses… Et certaines personnes rencontrées ces dernières années dans les manifestations et autres rassemblements de chômeurs nous ont même quittés prématurément.

Ceux qui stigmatisent les «chômeurs fainéants» seraient bien inspirés de modérer leurs propos car il est certain que le chômage, la précarité et leurs corollaires, l’exclusion et l’isolement, poussent des dizaines, voire des centaines de Françaises et Français à mettre fin à leurs jours. Alors, respectez leur mémoire !

Depuis 5 ans, nous luttons contre un discours anti-chômeurs qui progresse

Cet article de 2005 et sa rubrique n’est qu’un exemple parmi des dizaines témoignant de notre engagement militant qui trouve son relais sur nos forums où, depuis cinq ans, des milliers de personnes ont exprimé leurs souffrances et, parfois, trouvé du réconfort. Sur cette période, nous avons pu aussi constater (et déplorer) que les souffrances du chômage et de la précarité étaient un thème complètement éludé par les médias et les hommes politiques qui, pour certains, s’évertuent à stigmatiser les Chômeurs à la première occasion, comme nous l’avons vu plus haut et comme nous l’avons dénoncé lors de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy qui n’est pas le dernier à les instrumentaliser.

Ainsi, nous avons tenté sans succès de sensibiliser l’opinion à ce thème prioritaire par l'intermédiaire des médias (quotidiens, magazines, radios et télévisions). Si nous avons parfois réussi à entrebâiller leur porte par nos interventions dans des reportages diffusés aux heures de grande écoute (sur TF1, France 2, France 3…), nous avons vite déchanté, nous rendant à l’évidence qu’aucun travail de fond n’était vraiment mené par des journalistes qui se contentent le plus souvent d’une approche superficielle, vite fait mal fait, voire malintentionnée.

Pour cette raison, nous pouvons nous féliciter du remarquable travail réalisé dans le cadre du «Magazine de la Santé» de France 5. Entre les 2 et 6 novembre, cinq reportages de 7 minutes traitant de la souffrance des chômeurs et des salariés sur le point de perdre leur emploi ont été diffusés. Ces reportages sont consultables sur le site de la chaîne, et vous trouverez en haut de notre page d'accueil la vidéo du premier volet de cette série mis en ligne sur Dailymotion.

À noter que dans ce premier volet, les deux chômeuses/précaires interviewées sont plus qu'actives sur Actuchomage : Patricia, adhérente de longue date, très engagée par les actes et par l’écrit sur les questions qui nous mobilisent. Et Sophie, principale animatrice du site (sa rédactrice en chef) depuis son lancement en septembre 2004.

Voilà qui convaincra les sceptiques de l’intérêt de notre engagement militant qui s’inscrit sur le long terme, afin que les mentalités évoluent.

Si nous en sommes encore bien loin, l’actuelle mise en avant des souffrances au travail et au chômage participe à une prise de conscience qui, un jour ou l’autre, portera ses fruits.

Merci encore à celles et ceux qui soutiennent et participent à nos initiatives.

Yves Barraud
Président d’Alternatives Pour une Nouvelle Économie en faveur de l’Emploi (APNÉE),
association qui édite Actuchomage.org, Renovation-democratique.org et Inter-emploi.net

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Mis à jour ( Samedi, 07 Novembre 2009 22:42 )