Sarkozy célèbre le 100.000e auto-entrepreneur

Vendredi, 10 Avril 2009 13:07
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Ce jeudi 9 avril, Nicolas Sarkozy devait célébrer à l'Elysée le 100.000ème auto-entrepreneur. C'est du moins ce que son agenda annonçait dimanche dernier. Puis il a annulé pour se garder une belle journée de jeudi sans rendez vous officiel, à l'exception d'un déjeuner avec le premier ministre grec au Palais de l'Elysée.

Hervé Novelli, son secrétaire d'Etat aux PME, s'est chargé seul des annonces : il a lancé une "charte professionnelle et déontologique" des auto-entrepreneurs, pour "affirmer la conformité règlementaire de leur situation et leur professionnalisme" et définir des "garanties de compétences et de déontologie" à leurs clients. Aurait-il été sensible à certaines critiques ? On compterait déjà quelques 138.000 adeptes. Voici quelques rappels sur le sens de cette mesures. Simplifier la reprise d'activité est une excellente idée. Mais elle a son coût et, en l'occurrence, ses pièges.

Un dispositif réservé aux micro-entrepreneurs

Au cours du premier trimestre 2009, quelques 135.000 auto-entrepreneurs se sont inscrits. Hervé Novelli, secrétaire d'Etat chargé des PME, s'est félicité que les objectifs du gouvernement aient été ainsi largement dépassés. Le dispositif est clairement réservé aux micro-entrepreneurs. Le site d'information, ouvert à cet effet, explique :
« Si vous créez ou possédez déjà une entreprise artisanale ou commerciale soumise au régime fiscal "micro" avec un chiffre d'affaires inférieur à :
- 80 000 euros (HT) pour une activité d'achat / revente ;
- 32 000 euros (HT) pour une activité de prestations de services. »

32.000 € de ventes par an, cela représente un chiffre d'affaire de 2.700 € par mois. Avec un loyer, quelques frais de déplacement, du matériel à amortir, on frise le SMIC...

Ce statut couvre des réalités bien diverses. Nombre d'auto-entrepreneurs seraient artisans. Pourtant, le dispositif ne permet pas aux créateurs de s'immatriculer au répertoire des métiers, ce qui les maintient "en dehors de toute possibilité d'accompagnement, de formation et de qualification, de développement", a rappelé la Chambre des Métiers et de l'Artisanat de l'Ariège. D'après le président de la Fédération Française du Bâtiment, qui estime que "le statut d'auto-entrepreneur est une légalisation du travail au noir", ce statut ne convient pas non plus "aux champs du bâtiment", qui exige "une grande technicité et une vraie compétence" et "de la prévention et de la sécurité".

Taxer les foyers modestes ?

Le statut d'auto-entrepreneur a cette originalité d'appliquer aux revenus du bénéficiaire des taux fiscaux et sociaux globaux réduits à 13% (pour le commerce) et à 23% (pour les services). En fait, ces taux sont déjà ceux appliqués à la plupart des micro-entrepreneurs. Mais pire, cette "forfaitisation" occulte le bénéfice éventuel des exonérations d'impôts pour un contribuable modeste, ou le quotient familial : «Le prélèvement libératoire exclut la prise en compte de la situation familiale ou sociale du contribuable et la progressivité de l’impôt» (source).

Planquer les chômeurs ?

D'après l'ACOSS, l'organisme de tutelle des Urssaf, l'auto-entrepreneur est plutôt un homme (70% des cas contre 63% pour les créateurs habituels), et plus âgé (40 ans au lieu de 37,5 ans). les retraités seraient très friands de ce dispositif. Rappelons que la forte progression du chômage "officiel" se poursuit malgré ces 120.000 nouveaux "auto-entrepreneurs" depuis janvier. Cédric Omet rappelle, pour Marianne2, que la progression du nombre de sans-emplois depuis un an (+ 10%) est curieusement corrélée à l'augmentation des heures supplémentaires sur la même période. 25% des auto-entrepreneurs sont des chômeurs. Leur passage à ce nouveau statut ne leur procure pas un emploi : il les sort de certaines statistiques. Comme le rappelait Régis Soubrouillard, on ne sait pas si ces "entreprises" sont viables.

Régulariser des fraudeurs ?

Le président du syndicats des indépendants (commerçants et artisans) est plus sévère. Selon lui, ce dispositif sert à régulariser le travail au noir : "Ce statut sert à régulariser des personnes qui travaillaient de façon dissimulée ou désireuses de compléter leurs revenus, des salariés, des fonctionnaires, des retraités, mais ce ne sont pas des personnes qui sont créatrices de richesse et d'emplois, ça c'est clair et net".

Précariser les salariés ?

Ce dispositif précarise inévitablement les salariés : un salarié au chômage ne trouvant pas d'emploi dans son domaine d'expertise ne trouvera pas davantage de "client" s'il est à son compte. A moins que ses "clients" n'y trouvent leur compte, à savoir une plus grande flexibilité. Salarié, puis chômeur, puis auto-entrepreneur précaire… le beau parcours ! Effectivement, les auto-entrepreneurs se trouveraient plutôt dans le "conseil pour les affaires et autres conseil de gestion", les "autres services personnels", les "autres commerces de détail sur éventaires et marchés", la "programmation informatique" et la "vente à distance sur catalogue spécialisé". En résumé, des commerciaux, des informaticiens, voire des comptables. Bref, des fonctions structurantes de l'entreprise moderne...

Planquer des impôts ?

Le site Libertés Internet relève aussi que le statut d'auto-entrepreneur n'est pas si avantageux que cela : "Si on prend les chiffres de charges pour les chiffres d'affaires supérieurs au minimum donné par le RSI, le calcul reste du même type et montre qu’au final, le statut d’auto-entrepreneur n’est pas avantageux car l’argent reçu COMPTE DANS LE CALCUL DE L’IMPÔT SUR LE REVENU alors que dans le cas d’une société, cet argent est “consommé” par les frais (or comme il s’agit d’un complément d’activité, le statut d’auto-entrepreneur va augmenter votre impôt sur le revenu…)". Encore une astuce pour taxer davantage ?

Ami Sarkozyste, où es-tu ?

(Source : Sarkofrance)

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