ANPE : Qui sont les paresseux ?

Lundi, 04 Décembre 2006 09:39
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L'Agence Nationale Pour l'Emploi vient de lancer une campagne de communication afin de redorer son image auprès des entreprises et leur faire connaître ses services d'aide aux recrutement… pour un résultat très, très ambigu.

Réalisée pour un montant total de 900.000 € par l'agence de communication TBWA sous le slogan "Les Services Entreprises de l'ANPE, il y a ceux qui pensent nous connaître, et puis il y a nos clients", cette campagne est diffusée dans la presse quotidienne nationale (aperçu ci-contre, relevé par «Le Canard Enchaîné») et se poursuivra dans la presse hebdomadaire et mensuelle jusqu'en janvier 2007.

L'idée du paresseux qui tombe de sa branche est celle d'un "créatif", certainement inspiré par la vulgate qui circule sur la fainéantise légendaire des demandeurs d'emploi. Le pubeux qui l'a pondue fait déjà preuve de grande paresse intellectuelle et le symbole imaginé, plus qu'ambigu, semble limite insultant. Pire que le magazine «Le Point», qui a l'habitude de ce genre de calomnie, c'est l'ANPE elle-même qui se charge de faire passer le message.
Interrogé par «Le Canard» sur cette merveilleuse trouvaille, un "dirigeant de l’agence TBWA" avance, "gêné", que cet "argument" est du second degré : «Il s’agissait», en réalité, «de "tordre le cou aux caricatures" et de montrer que les chômeurs ne sont "(pas) paresseux"»... Quelle subtilité !

Et dans le cas où il s'agissait de faire de l'auto-dérision, il est difficile d'imaginer que les conseillers ANPE apprécient...

De l'argent public pour du vent

Le prix de cette campagne équivaut à plus de deux mille mensualités d'ASS (allocation spécifique de solidarité - 14,25 € par jour) dont on sait que les bénéficiaires représentent 17% des chômeurs sanctionnés depuis la réforme du contrôle des demandeurs d'emploi entrée en vigueur le 2 août 2005. Par exemple, pour 3.800 sanctions graduées à - 20% pendant deux mois (la punition "minimale") sur cette population particulièrement fragile, l'économie réalisée par l'Unedic est déjà d'environ 650.000 €…
Notons qu'outre les 900.000 € que coûte cette fantaisie marketing à l'ANPE, l'Etat a également lancé sa petite campagne de communication sur l'emploi des seniors, elle aussi particulièrement navrante (des "quinquas" qui sont censés courir un marathon aussi vite que les autres ou faire l'amour aussi longtemps… mais dont le gâchis de compétences professionnelles est totalement éludé) pour un coût de 5 millions d'euros sur deux ans. Du vent, rien que du vent !

De la paresse générale

Ainsi, pour "sensibiliser" les entreprises, en peu de temps ce sont 6 millions d'euros que les contribuables ont offert bien malgré eux à des pubards branleurs et stupides alors que, concrètement, la formation aux demandeurs d'emploi reste désespérément inaccessible et que la moyenne mensuelle des allocations-chômage avoisine les 800 €. Les employeurs continueront à discriminer, et M. et Mme Michu à croire que les chômeurs sont des parasites de la société.

Mais on se demande qui sont les plus paresseux quand on lorgne vers tous ces décideurs qui imaginent régler les problèmes de fond à grands coûts de communication. Car, voyez-vous, c'est "branché", ça évite de faire preuve de courage politique et, en plus, c'est payé par la collectivité !

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Mis à jour ( Lundi, 04 Décembre 2006 09:39 )