Compétitivité-emploi : le temps de travail à la carte avec baisse de salaire

Vendredi, 13 Janvier 2012 15:18
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Avant de partir, outre la création d'une TVA "sociale", l'UMP veut absolument instaurer une modulation du temps de travail qui sera, bien sûr, défavorable aux salariés.

Devant les députés de la majorité réunis à huis clos, François Fillon a exhorté ses troupes à serrer les rangs, faire fi des divergences et mettre les bouchées doubles pour la fin du quinquennat de Nicolas Sarkozy. Deux ultimes «mesures structurelles» particulièrement antisociales doivent absolument passer d'ici fin avril : la TVA "sociale" (qui ne fait pas l'unanimité au sein de l'UMP) + une réforme du droit du travail ciblée sur le temps de travail.

Le but, avec première, c'est de "renouer avec la compétitivité" en réduisant le coût du travail qui, selon eux, est la source de tous nos maux (en réalité, il s'agit d'affaiblir notre protection sociale).
Le but, avec la seconde, c'est d'enterrer définitivement les 35 heures (déjà bien supplantées par l'emploi en miettes qui se généralise) en accroissant la flexibilité. «Pour cela, il faut une réforme législative», a déclaré le Premier sinistre.

La loi est prête

Sauf que "le temps de travail à la carte" est déjà dans les tuyaux depuis plusieurs mois. En octobre dernier, nous avions relayé ici un article de Miroir Social qui alertait sur une proposition de loi permettant aux employeurs «d’augmenter [ou baisser] le nombre d’heures de travail sur une courte période [pouvant aller jusqu'à un an] sans que cette augmentation [ou cette baisse] constitue une modification du contrat de travail», avec, en cas de baisse de l'activité, un salaire réduit en conséquence.

Nous vous conseillons vivement de le (re)lire.

Au moment de sa parution, cette proposition de loi n°3706 du député UMP Jean-Luc Warsmann «relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives», déposée le 28 juillet 2011, avait été votée le 18 octobre en première lecture à l'Assemblée. Le texte devait être ensuite examiné par le Sénat qui, passé à gauche, l'a rejeté ce mardi 10 janvier. Hélas c'est l'Assemblée nationale qui aura, prochainement, le dernier mot.

Une affaire quasiment pliée

Voici ce que disent Les Echos du «futur projet de loi»… qui n'en est plus un. Cette réforme, «via les accords de compétitivité-emploi», doit permettre «une négociation dans une entreprise pour revenir sur le temps de travail afin d'adapter sa situation à son environnement économique». (...) «Aujourd'hui, la situation est la suivante : pour décider d'une baisse du salaire horaire, par exemple par le biais d'une réduction du salaire mensuel avec maintien du temps de travail ou encore en cas de hausse du temps de travail sans augmentation identique du salaire, il ne suffit pas de signer un accord avec les syndicats. L'employeur doit aussi obtenir l'accord individuel de chaque salarié. En cas de refus, un licenciement pour motif économique peut être prononcé, mais il peut être contesté devant les Prud'hommes. L'idée est d'empêcher cette contestation en considérant que le licenciement serait à motif personnel. Il s'agirait d'étendre au cas de baisse du salaire horaire par accord collectif une disposition introduite par… la réforme des 35 heures, en cas de baisse collective du temps de travail en deçà de la durée légale. En cas de refus d'un salarié, la procédure est sécurisée pour l'employeur.»

Une application scrupuleuse de la stratégie du choc

En donnant aujourd'hui priorité à cette réforme, scélérate et néfaste pour le salariat tout entier, François Fillon fait en sorte qu'elle soit mise tout en haut de la pile puis votée à l'Assemblée d'ici les présidentielles, au nom de la lutte contre le chômage... Et ne nous leurrons pas : le «sommet pour l'emploi» du 18 janvier fera exclusivement valoir les options des organisations patronales, y compris non représentatives. Les aimables consultations bilatérales préparatoires avec les syndicats ne sont qu'un écran de fumée visant faire croire au bon peuple qu'un dialogue social existe encore en Sarkozie. Quant aux associations de chômeurs, elles en sont exclues. 90% des mesures qui vont en jaillir concerneront le salariat, qu'il s'agit de laminer : les privés d'emploi, eux, sont au bon endroit — au fond du trou — et peuvent bien y rester.

Il y a des chants du cygne particulièrement grinçants. Avec l'UMP — dont la devise fut «doux avec les forts, dur avec les faibles» —, jusqu'au dernier souffle, l'œuvre sera chargée de cruauté.

SH


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Mis à jour ( Vendredi, 02 Mars 2012 15:07 )