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Accueil La revue de presse Faut-il brûler le code du travail ?

Faut-il brûler le code du travail ?

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- Extraits d'un article du Monde publié le 15/02/05 -

C'est une indéniable victoire que le gouvernement a remporté sur les 35 heures, en obtenant de l'Assemblée nationale qu'elle vote, mercredi 9 février, un nouveau texte de loi.

Une victoire qui, en apparence, est le résultat d'une habileté : pressé par l'aile libérale de sa majorité ainsi que par Nicolas Sarkozy de ne pas s'en tenir aux premiers assouplissements de janvier 2003, il avait accepté qu'un nouveau texte soit examiné par les députés ; mais, pour ne pas donner le sentiment à l'opinion d'être aux ordres du Medef, il a évité d'être en première ligne.
C'est donc au travers d'une proposition de loi, élaborée par l'UMP, que l'Assemblée nationale a voté cette seconde salve d'assouplissements. Le gouvernement peut donc penser avoir fait coup double : les lois Aubry ont été pour de bon mises à mal, au travers des dispositions annoncées (sur le régime du compte épargne-temps, sur le contingent des heures supplémentaires et, surtout - principal sujet de satisfaction du patronat -, sur la possibilité ouverte, par simple accord d'entreprise, de transformer du temps libre en rémunération) ; ni Matignon ni L'Elysée n'en portent pourtant la paternité officielle.

Ne s'agit-il vraiment que d'une tactique ? En fait, la procédure est emblématique de la politique sociale de ce gouvernement - une politique qui avance fréquemment en crabe. Car, si l'on recense les réformes récentes, on arrive vite à la conclusion que le code du travail a été bouleversé ces derniers mois dans des proportions spectaculaires. A chaque fois, le gouvernement y est parvenu de la même manière : sans jouer cartes sur table ; souvent même en cherchant à faire passer par amendements des refontes de première importance dans le cadre de projets de loi dont le but affiché n'avait strictement rien à voir.

Que l'on se souvienne de ce que les experts du droit du travail appellent l'inversion de la hiérarchie des normes. Quand elle a été débattue en décembre 2003 par les députés, la réforme n'a guère retenu l'attention de l'opinion. La complexité technique du dossier y est pour quelque chose. Mais le gouvernement a aussi usé de beaucoup de précautions - pour ne pas parler de ruses. Les parlementaires ont été invités à examiner un projet de loi traitant de la "formation professionnelle tout au long de la vie" et du "dialogue social" - deux sujets suffisamment importants pour occuper des débats distincts. Et c'est sous la forme d'amendements, comme s'il s'agissait d'une petite retouche et non d'une réforme majeure, que François Fillon, à l'époque en charge du dossier, a demandé aux parlementaires de voter cette
inversion de la hiérarchie des normes. Or il s'agit d'un séisme social. (…)

En proposant que des accords d'entreprise puissent désormais ouvrir droit au bénéfice de dérogations au code du travail qui n'étaient auparavant réservées qu'à des accords de branche - et dans des sujets aussi importants que le recours aux CDD, au travail intérimaire, à la durée du travail... -, le gouvernement a bouleversé radicalement l'"ordre public social". En cours d'examen, la réforme a certes été encadrée (en particulier des domaines d'exclusion sont prévus, et des accords de branche peuvent exclure ces dérogations) mais, dans ses grandes lignes, elle est passée sans trop faire de vagues.

La méthode retenue lors de l'examen par l'Assemblée, en décembre 2004, du projet de loi de Jean-Louis Borloo sur la cohésion sociale est une autre illustration de cette politique. La réforme, dont le but affiché était de réduire la fracture sociale, a subrepticement été enrichie par amendements de dispositions tendant à faciliter... les licenciements.
Alors que la réforme avait officiellement pour ambition de démontrer au pays que le gouvernement avait bien reçu le message des électeurs, lors des élections régionales, puis des élections européennes, et que la priorité allait désormais au social, l'embardée a été spectaculaire.

Concrètement, les délais de recours en cas de procédure de licenciement ont été brutalement réduits : de cinq ans, le délai de contestation a été ramené à un an. Les reclassements internes ont cessé d'être pris en compte dans la barre des 10 licenciements économique au-dessus de laquelle il faut faire un plan social. Et une autre jurisprudence très importante a été renversée, celle qui faisait obligation à une entreprise de reprendre un salarié en cas d'annulation de son licenciement. Bref, des pans entiers de la loi dite " de modernisation sociale", votée sous la gauche, ceux qui encadraient les procédures de licenciement, ont été rayés d'un trait de plume. (…)

Il faut garder à l'esprit qu'en matière sociale Jacques Chirac est coutumier de cette politique : en utilisant parfois des mots à résonance sociale que des syndicalistes ne renieraient pas ; mais en conduisant, en fait, des réformes dont la philosophie est clairement libérale.

Déjà en 1995, entonnant le grand refrain du combat contre la fracture sociale, il avait mis à peine quelques mois pour revenir à une politique nettement plus libérale, donnant la priorité à la
flexibilité. N'est-ce donc pas le même jeu de rôles auquel on assiste depuis 2002 ? Au lendemain de sa réélection, Jacques Chirac, sous la double pression du patronat et de Nicolas Sarkozy, devait donner des signes d'une politique sociale plus libérale. Quelques débâcles électorales plus tard, Jean-Louis Borloo a été appelé à la rescousse. Mais moins pour changer les grandes priorités de la politique sociale - celles d'une flexibilité accrue - que pour en adoucir la présentation. (…)

En plus des réformes déjà engagées, il y en a, d'ailleurs, de nombreuses autres en gestation, portant sur la définition du contrat de travail - les récents rapports de Michel de Virville et de Michel Camdessus proposent de le modifier en profondeur -, sur la fixation des seuils sociaux au sein des entreprises, ou encore sur les modalités du travail dominical.

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Mis à jour ( Mercredi, 16 Février 2005 17:18 )  

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